Marilyn Monroe a disparu dans la nuit du 4 au 5 août 1962 à Los Angeles dans des circonstances mystérieuses. Cinquante années après sa mort, le mythe de la bombe sexuelle continue. Les avis divergent sur la véritable personnalité de la célèbre star américaine. Selon certains biographes, elle a été la plus belle idiote blonde du XXe siècle, à la fois manipulatrice et mal aimée. D’autres la considèrent comme la plus grande icône que le cinéma hollywoodien ait jamais produite. A chacun son appréciation. A l’occasion du 50e anniversaire du décès de l’actrice, on est bien obligé de constater que l’effet glamour se poursuit. Marilyn semble promise à une fascination populaire éternelle.

"Mao-Marilyn" (Dali, 1971)

De Marilyn Monroe, il nous reste trente films et des milliers de photographies plus ou moins dénudées. Le pape du Pop Art Andy Warhol lui a consacré en 1964 des sérigraphies reproduites dans le monde entier. Beaucoup moins connu est le tableau «Mao-Marilyn» créé en 1971 par Salvador Dali. L’œuvre hybride a été conçue à partir d’un montage photographique réalisé par Philippe Halsman. On reconnaît le faciès voluptueux de la star pourvu du crâne dégarni et du col de Mao. L’image a servi plus tard à l’illustration de la jaquette de l’album de l’opéra-poème «Etre Dieu», enregistré par Salvador Dali en 1974 dans les studios parisiens de Pathé-Marconi. Dans cette étrange oeuvre musicale consacrée à la Création du Monde, le prophète Dali annonce que la Chine et les USA s'uniront un jour pour dominer la planète.

L’identité américaine constitue un mélange de races multiples, issues de vagues migratoires successives : européennes, hispaniques, asiatiques. La première devise des Etats-Unis «E Pluribus Unum» (De plusieurs, un seul) est le reflet constitutionnel de ce métissage démographique. La composition ambiguë de Dali dépasse l’esprit de la fusion des origines ethniques pour prendre le caractère d’un signal prémonitoire à caractère géopolitique. Car le symbole équivoque créé en 1971 par le peintre-visionnaire catalan a une signification politique. Les faits de l’Histoire contemporaine en témoignent.

Quand le président américain Richard Nixon s’est rendu en 1974 à Pékin sur invitation de Mao Zedong dans le but d’activer les échanges économiques entre les USA et la Chine, Dali avait envoyé au président Mao une reproduction de «Mao-Marilyn». Ce montage iconographique est resté un symbole paradoxal des relations entre Pékin et Washington, devenue conflictuelles. Car en quarante ans, les affaires du monde ont évolué.



La Chine, gigantesque usine de la planète, est en passe de devenir la première économie mondiale. La rivalité des deux superpuissances a tourné en bras de fer entre le dollar fragilisé et la monnaie chinoise du yuan. Les Etats-Unis voudraient pénaliser la Chine, accusée de sous-évaluer sa monnaie pour doper ses exportations, détruisant au passage des milliers d’emplois américains.

Grâce à l’intuition du visionnaire Dali, le 50e anniversaire du décès de Marilyn devient un signal, qui réunit le néo-libéralisme américain et l’étrange communisme chinois dans un spectre hallucinant. En février 2012, les Chinois se sont engagés à rééquilibrer leur économie, mais la réévaluation du yuan n’est toujours pas à l’ordre du jour. Depuis 2008, les problèmes récurrents des dettes souveraines dans la zone Euro ont suscité de profonds désordres sur le plan financier international. On ne voit toujours pas le bout du tunnel de la crise. Une contraignante guerre des monnaies entre la Chine et l’Amérique aurait des conséquences redoutables pour l’ensemble de la planète. A suivre...

4 août 2012